Je ne sais pas s’il y a une place à Hinova, ni si les jeunes ont l’habitude de s’y rencontrer et d’y passer ensemble leurs chaudes après-midis d’été. Mais, dès qu’il avait connu Alina I., Eugen avait sans doute arrêté de fréquenter cette place hypothétique. Il avait demandé à un copain s’il pouvait lui prêter son scooter et il s’était éloigné autant qu’il pouvait du village avec Alina I. Ils avaient passé des journées à se raconter de petites choses – leurs vies et surtout leurs désirs. Eugen avait parlé de son père, qui avait eu un bon poste dans l’administration, mais qui finissait ses soirées en criant dans un verre de mauvais vin. Alina I. avait parlé de son départ d’Hinova, quand elle était petite. Elle avait parlé du Canada, de sa grandeur, du lac, et des gratte-ciels, et de l’école, et de l’anglais qui était désormais sa langue, et de ses copines canadiennes, et de ses copains qui ne savaient pas la courtiser comme savaient le faire les roumains et qui n’osaient pas l’embrasser.