La lumière de ce qu’on avait cru être le phare du port de Bari avait disparu. C’était la fin du mois d’octobre et nous étions en mer, Fabrizio et moi, depuis quinze heures. Nous étions partis le matin à cinq heures de Villanova, avec un Boxer 24 - un petit bateau de six mètres qui s’appelait Amapola. Nous n’avions pas de carte : c’était en principe une navigation facile, Villanova-Bari, en longeant la côte. La distance entre Villanova et Bari est de trente-neuf miles marins. Mais le vent venait de nord ouest et c’est exactement dans cette direction que nous devions aller. Ni Fabrizio ni moi ne connaissions l’entrée du port de Bari. De grands ferrys passaient tout près de nous et nous faisaient très peur. Nous étions complètement perdus, dans le noir étouffant de l’eau. Il n’est pas nécessaire de traverser les océans pour se perdre, il suffit d’être à un mile de la côte, la nuit, sans carte, face à une ville que l’on connaît d’ailleurs très bien, mais depuis la terre, pas depuis la mer.