Mon arme ici, c’est que je peux jouer avec mes souvenirs. Ce qu’ont vécu Frédéric et Deslauriers, je l’ai vécu moi-aussi. Et puisque nous sommes désormais arrivés à la fin, je suis obligé d’en faire mention. C’était à l’époque où le maire se plaignait du fait que les putes se rapprochaient trop de la ville. Il trouvait ça inadmissible. Nous décidâmes d’aller vérifier, en vélo, sous la pluie. L’acte manqué le fut encore plus que celui de Fréderic et Deslauriers, qui eux au moins arrivèrent jusqu’au bordel. Nous pédalâmes pendant trois quarts d’heure pour constater que le maire mentait - sur ça aussi il mentait, comme sur sa lutte contre l’immigration clandestine sur laquelle il gagnait pas mal d’argent en demandant un pourcentage sur les ventes de briquets et de mouchoirs en papier des sénégalais clandestins gérés par ses amis. Le maire mentait, il n’y avait pas de putes à côté du centre-ville. Ou alors il était habitué à y aller en voiture, car en vélo ce n’était vraiment pas possible.