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Giorgio

Il n’est pas possible de tout raconter. Il n’est pas possible, par exemple, de parler de Giorgio, le sénégalais qui sillonnait Pise du matin au soir, avec son sac chargé de briquets qui ne fonctionnaient pas et de mouchoirs en papier d’une sous-marque inconnue. Il disait qu’il s’appelait Giorgio, drôle de prénom pour un sénégalais, mais c’était peut-être une traduction de son vrai prénom, pour faciliter les rapports avec les italiens, pour faire voir qu’il s’était bien intégré à force de passer ses journées dans la rue, demandant un euro ou quelques centimes aux étudiants - car il n’y avait que les étudiants qui lui en donnaient. À chaque fois qu’il me voyait, il me disait : "donne-moi cinq euros, c’est un bon prix, rien que pour toi". Peu importe si le briquet valait à peine dix centimes. J’ai aperçu Giorgio, il y a quelques mois, en passant à Pise entre deux avions. Les années ont passé pour lui aussi, mais ça ne l’a pas empêché de me reconnaître et de me lancer sa phrase habituelle.

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