Je mangeai des pâtes aux calamars avec Francesco Orlando – ou était-ce un risotto à l’encre de seiche ? – un soir de décembre 2001, dans un restaurant en bas de chez lui, après avoir passé l’après-midi dans son appartement chargé de livres à discuter de théorie de la littérature et de son rapport complexe avec Tommasi di Lampedusa. Sa bibliothèque incroyablement fournie était ordonnée par date de naissance des auteurs, toute discipline confondue. Et quand je dis toute discipline, je veux dire littérature, philosophie, poésie, mais aussi musique. Francesco Orlando avait une quantité étonnante de partitions (l’œuvre complète de Mozart, Beethoven, Bach, Wagner bien sûr, Schönberg, Verdi). J’allais chez lui pour consulter des partitions introuvables ailleurs. C’était comme dans un rêve. Il me faisait croire qu’être intellectuel pouvait vouloir dire être prêt à refuser de faire cours parce qu’il y avait des policiers en civil dans le bâtiment. Voilà pourquoi je classe mes livres comme lui.