Certes, ils n’y étaient pas allés pour prendre des photos. Les vendanges, c’est dur, tout le monde le sait. Mais ils ne s’attendaient pas à ça, ils ne croyaient pas que leur expérience atteindrait ce niveau de violence. La soeur d’Eugen et son mari revinrent de la campagne dix jours après leur départ. Nous étions très inquiets, surtout Eugen. Je ne l’avais jamais vu aussi préoccupé. Certaines fois, il hurlait contre sa soeur : « Cette pouffiasse, elle était obligée de venir se faire tuer en Italie ? Et son mari, quel connard ! » Comme s’il était le seul responsable, comme s’il leur avait passé sa maladie de clandestin. Quand ils se pointèrent à nouveau à l’appartement de Peppe, Eugen bondit de joie. Au moins, ils étaient vivants. Crevés, les mains blessées, assoiffés, affamés. Ils vidèrent le frigo de Peppe. Puis ils prirent un air sérieux : « Il faut qu’on parte d’ici. Il faut qu’on rentre… Il faut trouver de l’argent et qu’on se barre d’ici. Toi aussi Eugen : il faut qu’on rentre ! »