Nous sommes tous un peu fous – du moins c’est ce que nous aimons déclarer dans nos milieux un peu créatifs et littéraires. Mais parfois la folie n’est pas très créative, elle n’est que tristesse, vide, et solitude. Dans les couloirs de cet hôpital, où les patients se promènent en traînant les chaussons, où il ne se rasent pas depuis plusieurs jours, où tout le monde fume – car c’est tout ce qu’on peut faire –, dans ces couloirs, on ne pense pas vraiment à écrire de beaux textes ou à mettre en question la normalité pour aller au-delà, pour être originaux. Dans ces couloirs, j’ai rencontré le spectre drogué de celui qui était mon ami, j’ai entendu les échos lointains de ce qu’était sa voix, j’ai vu les reflets éteints de son regard. Il n’y a plus de place pour l’espoir, ni pour la vie. Il n’y a rien à dire, rien à ajouter, rien à objecter et rien à comprendre. Dans ces couloirs, je n’avais même pas envie de pleurer ou d’être triste – juste d’allumer, comme tous les autres, une cigarette.