Les mathématiques sont une science rassurante. Rassurante et facile parce que l’on sait toujours si c’est bon ou non – ou, tout du moins, si ça marche ou pas. Les mathématiciens peuvent bien dormir la nuit, ils dorment du sommeil du juste. Le philosophe le plus sûr de lui n’arrivera jamais à donner une réponse avec la même sérénité qu’un mathématicien. À Pise, on taquinait les étudiants en mathématiques car ils étaient convaincus d’avoir la vérité, toujours. Cette assurance les transformait parfois en de drôles de bêtes. Une fois, j’avais assisté perplexe à un dialogue entre deux étudiants. Dans la file d’attente du restaurant universitaire, l’un regardait, admiratif, les biceps de l’autre. « Putain, ces muscles que tu as ! Mais tu fais quoi ? » « L’École Normale Supérieure, classe de mathématiques ». Moi, je suis perdu, il n’y a jamais la bonne phrase, il n’y a jamais les mots justes, il s’agit toujours de s’en sortir d’une manière ou d’une autre, en limitant, si possible, les dégâts.