La question à mon sens n’est pas de retrouver le temps perdu, mais d’être capable d’en perdre à nouveau. Savoir transformer la nostalgie en enchantement, comme un rêve d’Ithaque renouvelé, naïf, frais, authentique et spontané, sans aucun artifice – littéraire mais ingénu. « Voudriez-vous revivre ces vingt dernières années, et même toutes les années depuis votre naissance ? » demandait un passant à un vendeur d’almanachs. « Je crois bien, mon cher monsieur, et plût à Dieu que cela fût possible ! » « Même si cette vie était exactement celle que vous avez vécue, ni plus ni moins, avec les mêmes plaisirs, les mêmes ennuis ? » « Ah ! cela, non, par exemple ! » répondait le marchand. « Quelle vie voudriez-vous donc ? » « Une vie comme ça, celle que Dieu me donnerait, sans autres conditions. » « Une vie au hasard, dont rien ne serait connu d’avance, une vie comme l’année qui vient ? » « Justement. ». La question n’est pas de retrouver le temps perdu, mais d’être capable d’en perdre à nouveau.