Accueil Les règles du jeu Table des matières Incipit Qui ?

Un autre Eugen

Mari et femme s’embrassent sans aucun doute, lorsqu’ils se retrouvent. C’est pourquoi, dans la Cantatrice chauve, les deux inconnus qui se découvrent mari et femme, à la fin d’un long syllogisme absurde, finissent dans les bras l’un de l’autre. Peppe utilisait cette scène pour dépasser la gêne du premier baiser avec les filles qu’il draguait. Il racontait qu’il était acteur et proposait à son amie de jouer ensemble la scène des retrouvailles. À la fin, il avait souligné la didascalie qui indique : « ils s’embrassent ». Il pouvait ainsi justifier ce premier baiser par les besoins du scénario. Cela donnait à ce geste un caractère nécessaire et absolu, une espèce de destin. On s’embrasse parce que c’est écrit, comme si c’était une prophétie, la réalisation d’une volonté divine qui avait gravé dans un livre, depuis toujours, cette rencontre et cet amour. La littérature peut nous alléger du poids de nos choix. Ce qui est écrit ne peut que continuer à se réaliser et à se répéter, à l’infini.

texte précédent : Bises texte suivant : Le jeu de la zara