L’ordinateur qui m’était tombé des mains en 2003, je l’ai utilisé jusqu’en 2006 quand, à titre de récompense pour l’organisation d’un gros colloque, on me donna un nouveau portable. Ces trois années ont été une expérience assez intéressante. Mon principal outil de travail, le dispositif devant lequel je passais la plupart de mes journées, était cassé. Ou mieux, il me lançait des défis assez originaux : comment voir quand le regard est entravé, comment transformer l’obstacle en un ressort de créativité. Mon écriture a sans doute été façonnée par la grande tache noire qui rendait illisible tout ce qui se trouvait au centre de mon écran. Je ne sais pas pourquoi je n’ai jamais pensé à brancher l’ordinateur à un écran externe. On en trouvait déjà d’occasion à dix euros. Probablement que je n’en avais pas besoin. D’ailleurs aujourd’hui, devant mes grands écrans à haute résolution, je sens la nostalgie de cette tache - heureusement j’ai encore cet ordinateur… je vais l’allumer pour la revoir.