L’ordinateur me glissa des mains et tomba par terre dans un grand bruit. J’étais à l’aéroport de Francfort, sur le point de prendre le vol pour Pise et de rentrer de mon séjour allemand. J’aurais voulu l’allumer pour voir si tout allait bien, mais ils étaient sur le point de clore l’embarquement et il n’y avait plus assez de temps. Puis le vol, la valise loin de mon siège, impossible de l’atteindre. Et enfin le taxi, de l’aéroport à la maison. Premier geste après avoir ouvert la porte, avant même d’enlever mon manteau : j’allume et croise les doigts. C’était en 2003 et il s’agissait de mon premier ordinateur portable. J’avais passé l’Université à utiliser un ordinateur fixe récupéré chez quelqu’un qui voulait le jeter - Linux permet de faire tourner des machines destinées à la poubelle sous Windows. Cet ordinateur, je l’avais depuis un an seulement - un an et demi peut-être. Une grosse tache noire coupait l’écran en deux. Ma thèse de doctorat fut un jeu de cache-cache avec cette tache.