Pour être libre, il faut savoir mettre en question les règles les plus basiques de notre logique – et de nos sentiments. Il faut savoir tout abandonner, tout oublier, tout mettre entre parenthèses. John le musicien – nous raconte Fabrizio De André – n’avait jamais pensé ni à l’amour ni à l’argent ni au ciel. Ne pas penser à l’argent, cela peut facilement entrer dans nos pratiques d’intellectuels de gauche. Oublier le ciel aussi – à part pour lui adresser quelques blasphèmes de temps en temps. Mais ne pas penser à l’amour ! Voilà qui semble être beaucoup plus difficile. Qu’allons-nous faire sans amour ? Pourtant si Eugen l’avait oublié, son amour, il aurait sans doute été capable de s’en sortir. Il a peut-être fini par l’oublier, par ne plus y penser. Heureusement, il y a d’autres choses auxquelles s’attacher. John le musicien le savait bien et étonné, pendant qu’il payait son vin, il demandait au marchand de liqueurs : « Dis-moi, toi qui en vends, qu’achètes-tu ensuite de meilleur ? ».