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Otium

Je me suis souvent senti coupable pendant mes années d’université, parce que j’avais l’impression de ne pas faire grand chose. Une espèce de sentiment confus qui me disait que le plaisir de ces journées dédiées à lire des livres, à chercher le soleil dans chaque coin des places et des terrasses et à boire du café, j’étais en train de le voler à quelqu’un. Le fait que j’étais étudiant et que c’était là mon devoir ne me semblait pas une bonne excuse. J’essayais alors de transformer l’étude en travail, je disais « je dois travailler » au lieu de « je dois étudier », je cherchais à convaincre ceux qui m’entouraient du fait que j’étais surchargé et surtout, j’essayais de m’en convaincre moi-même. On est poussé à croire qu’il y a une sorte de justice dans le travail et dans l’occupation alors que l’oisiveté est une faute grave. L’écho de l’otium des latins était trop loin pour que je puisse l’écouter. Tout devait être rempli ou du moins le paraître pour ces autres dont je cherchais l’estime.

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