Je ne veux pas relater l’état des choses, je veux les raconter comme elles devraient être. Continuons donc la route vers l’Angleterre, avec notre bateau bien bourge, loué pour ces étranges vacances. La loi permet à H., L., George et moi de traverser la Manche comme et quand nous le souhaitons. La seule contrainte est de se déclarer aux autorités du port, une fois arrivés de l’autre côté. Mais Eugen ne pourrait déjà pas être en France, et encore moins passer d’autres frontières. Venir ici a été facile, en voiture il n’y a plus aucun contrôle. Et il serait probablement très facile aussi de traverser la Manche inaperçus, si ce n’est que nous avons fait beaucoup de publicité, nous avons annoncé que l’on boirait du Martini, nous, cinq amis, sur un bateau à voile, en vacances, mais que parmi ces cinq buveurs de Martini – tous les cinq polyglottes et cultivés – il y en a un qui n’a pas le droit d’être là. On aimerait bien qu’on nous arrête, on aimerait bien que l’absurde montre son absurdité.