Le sexe a perdu sa puissance d’émancipation. Baiser, paraît-il, ne libère plus du tout, au contraire. Pour s’émanciper, il faut plutôt manger biologique. Il y a quelques années, je considérais mes élèves comme des gens du même âge que moi – et j’avais raison, car j’ai commencé à enseigner à vingt-trois ans et il m’arrivait souvent que mes étudiants soient même plus âgés que moi. Puis, un jour, alors que je parlais de la puissance d’émancipation du sexe, une jeune fille au premier rang me dit : « Ouais, M’sieur, mais ça c’est des trucs de votre génération ! ». En une seule phrase, elle me disait d’une part que je n’avais pas son âge et, de l’autre, qu’elle me considérait plutôt de la génération de mes parents que de la sienne – et encore, mes parents avaient seize ans en 68. Depuis, j’ai commencé à vouvoyer les étudiants et à chercher autre chose que le sexe pour me libérer. Je n’aime pas manger bio mais je m’émancipe en prêtant beaucoup d’attention au choix de mes boutons de manchette.