Cet égarement orienté, je l’ai sans doute appris en bateau mais aussi en écoutant F.F. parler ou jouer. F.F. m’a appris pas mal de choses, directement lui ou par les sons qu’il écrit. Car F.F. raconte le monde avec des sons qui ont une cohérence mathématique, comme s’il était un philosophe pythagoricien, comme s’il arrivait à attraper dans l’air les lois fondamentales de l’univers et à les transformer en rythmes. Mais, en même temps, ces sons parlent d’une dispersion qui fait peur et rassure. J’ai connu F.F. il y a quinze ans à la bibliothèque de philosophie, alors qu’il écrivait des notes sur une énorme feuille, avec à ses pieds un sac contenant des chaussures – il ne pouvait être qu’organiste. Il m’a transmis sa peur de disparaître, de s’égarer dans le vide, mais aussi son assurance quand il s’agissait de savoir ce qu’il fallait faire – il fallait écrire. Quand j’ai besoin de motivation, je sais que c’est à lui qu’il faut penser, à lui et à sa musique, à ses angoisses et à son génie.